Le gouvernement engage une réforme du permis de conduire face à un examen de plus en plus cher et des délais de passage de plus en plus longs. Depuis mi-Septembre, les inspecteurs se mobilisent face à cette réforme qu’ils voient d’un mauvais œil car elle ne créera pas d’emploi et selon eux ne devrait pas véritablement solutionner le problème.
La nécessité d’une réforme
Depuis l’automne 2013, la commission Gilbert en charge de la concertation sur les usages de la route a planché sur le sujet et a produit en 2014 un constat alarmant et sans appel : avec une moyenne de 98 jours, la France est le pays d’Europe avec le délai d’attente le plus long pour repasser le permis de conduire après un échec. En 2009, il ne fallait compter que 60 jours.
Des délais d’attente pendant lesquels les élèves prennent des leçons, tant est si bien qu’un permis peut coûter aujourd’hui jusqu’à 3000€ quand on échoue au 1er passage.
Qu’est ce qui explique ce dérapage ?
Différents éléments sont en cause : la suppression du service militaire, pendant lequel de nombreux jeunes passaient le permis, le passage aux 35h pour les inspecteurs, des départs non remplacés, une directive européenne exigeant un examen pratique de 30 minutes, que la France a passé à 32 minutes …
En outre, il faut savoir que nous comptons actuellement 1 280 inspecteurs en France, qui en réalité ne consacrent que 43% de leur temps au passage du permis B, car ils doivent aussi faire passer les autres permis, certains sont même rattachés à l’administration centrale pour certaines tâches. Le manque d’effectif constituerait ainsi l’un des principaux motifs de cette situation dégradée.
Si le permis est souvent une condition d’embauche, l’urgence de le passer se fait souvent sentir dans des endroits mal desservis par les transports ou excentrés or ces jeunes sont souvent encore plus mal accompagnés dans leurs démarches de passage du permis et ce sont souvent eux qui souffrent des délais les plus longs… La réforme n’est pas seulement souhaitable, elle est une nécessité. C’est ainsi que Mr Cazeneuve, ministre de l’intérieur, s’est engagé d’ici 2 ans à réduire le délai à 45 jours et à faire en sorte que les candidats puissent bénéficier d’au moins 200€ d’économie sur le passage de leur permis. Néanmoins, face au problème budgétaire actuel, le ministère ne prévoit pas d’embauche pour réaliser cet objectif.
Comment réformer le permis ?
Depuis cet été, la réforme est progressivement mise en route. Depuis le 1er Juillet, la surveillance de l’examen du code a été partiellement confiée à des gendarmes pour permettre à plus d’inspecteurs d’être sur le terrain, avec pour objectif en 2015 de déléguer cette mission à un opérateur privé. Si cette mesure permettra à terme d’accroître le nombre de passages d’examen, cela alourdira aussi la facture par candidat de 30€ !
Depuis le 1er Août, une manœuvre a été supprimée et l’épreuve pratique ainsi réduite de 3 minutes, ce qui permettrait de faire passer un candidat de plus par jour, par inspecteur.
A partir d’Octobre, le ministère prévoirait aussi de modifier le système d’attribution des places d’examen. Jusqu’à maintenant les créneaux étaient attribués aux auto-écoles en fonction du planning des inspecteurs et du nombre de candidats présentés pour la 1ère fois au cours des 12 dernier mois, corrélé au taux de réussite. Un système qui désavantage les candidats ayant échoué une première fois. Le nouveau système devrait permettre aux candidats repassant le permis d’avoir une place plus rapidement.
Difficile de prédire si ces éléments vont suffire à redresser la barre. Mais il est certain que les mesures, certes nécessaires, faites à l’économie sont rarement les meilleures et les plus efficaces. En outre, la réforme prévoit de faciliter le passage du permis mais quid des jeunes qui n’ont pas les moyens matériels d’y accéder ? Rien n’est encore prévu pour alléger véritablement le coût de celui-ci ou faciliter l’accès aux auto-écoles.
De nombreuses voix se font de plus en plus entendre sur le sujet, comme les auto-écoles low-cost ou encore certains experts qui prônent l’abolition de l’examen du permis au profit d’une formation plus efficace, autant de pistes qu’il pourrait être intéressant d’explorer pour une amélioration en profondeur des conditions de délivrance du permis de conduire.
Une réflexion sur "Réforme du permis de conduire : un mal nécessaire ?"