Moteur à fond, roue avant dressée, une douzaine de deux-roues prennent d’assaut la route en centre-ville.
Le cross bitume est cette pratique d’acrobaties à moto, scooter ou quad, venue tout droit des États-Unis, qui séduit certains motards en France, bien que ce spectacle de voltiges soit interdit.
En 2017, sur l’ensemble du territoire, 8 700 rodéos ont été constatés. Et ce phénomène semble en constante progression.
Cross-bitume ou rodéo sauvage : qu’est-ce que c’est ?
Les premiers “bikers” de rue ont commencé à se faire connaître dans les années 1970 Outre-Atlantique. Depuis les années 2000, le cross-bitume a conquis l’Hexagone.
Entre plaisir extrême et quête d’adrénaline, ce sport aussi appelé « rodéo urbain », qui se pratique en groupe, consiste à utiliser les motocyclettes de type cross, des quads ou encore des scooters puissants pour réaliser des levées de roue plein gaz, associées à plusieurs figures.
Certaines de ces voltiges sont clairement inspirées du stunt, comme le wheeling à moto, cette cascade qui consiste à rouler uniquement sur la roue arrière ; mais aussi le stoppie (freiner fort de l’avant pour lever la roue arrière) ou le burn (blocage du frein avant et forte accélération forte pour faire déraper le pneu arrière et produire de la fumée).
Ces défis réalisés sur la voie publique ne font pas que des heureux auprès des riverains mais aussi des autres usagers de la route.
Différencier les rodéos sauvages et la pratique du stunt
Ce sont deux choses bien différentes. Le rodéo sauvage est un enchaînement de voltiges plein gaz sans respect du Code de la Route, parfois effectué à contre-sens, etc.
Le stunt au contraire, est un type d’épreuves né aux États-Unis dans les années 1980, puis diffusé en France, qui se déroule sur circuit, parking ou route fermée.
La mécanique d’une moto stunt est adaptée : pneus moto dégonflés à l’arrière, réservoir aplati, guidon bracelet, repose-pieds fixé sur l’axe de roues, carénage enlevé, etc.
Bien que des compétitions existent côté américain, le stunt n’est pas reconnu comme sport en France. Les amateurs pratiquent ces performances lors de shows comme des salons de la moto.
Pour s’entraîner, ils se retrouvent régulièrement sur des parkings fermés, des aires industrielles désaffectées, etc.
Les problèmes qu’engendre la pratique du cross-bitume
Accélération soudaine, freinage brutal, etc… le défilé de véhicules en agglomération, mais aussi à la campagne, pose problème. Les riverains sont les premiers à subir les nuisances sonores.
La législation française précise que « les véhicules à moteur ne doivent pas émettre de bruits susceptibles de causer une gêne », sans toutefois fixer une limite de décibels.
Sont aussi pointés du doigt les comportements à risques : excès de vitesse, dépassement à outrance, slalom au milieu des automobilistes, etc. : ce non-respect du Code de la Route est clairement dénoncé. Mais ce qui inquiète, c’est aussi l’attitude de ces pilotes.
Même s’ils ont une expérience et une maîtrise de leur « bécane », pris dans l’ambiance du groupe, piqués d’adrénaline, ils ne font plus nécessairement attention aux détails auxquels tout conducteur doit veiller : les piétons qui traversent, les voitures qui s’engagent, etc. Ce comportement de compétition a sa place seulement sur un circuit ou un espace fermé.
Cross bitume et rodéo à moto : quels sont les risques ?
Que dit la loi ?
La lutte contre les rodéos motorisés n’est pas récente. Mais une nouvelle loi, votée le 3 août 2018, offre un nouveau cadre juridique visant à prévenir et réprimer ces pratiques dangereuses.
- Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende « le fait d’adopter, au moyen d’un véhicule terrestre à moteur, une conduite répétant de façon intentionnelle des manœuvres constituant des violations d’obligations de sécurité ou de prudence » prévues par le Code de la Route. Les peines sont portées à 2 ans d’emprisonnement et à 30 000 € d’amende lorsque les faits sont commis en réunion ; et à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende quand la personne a fait usage de stupéfiants, d’alcool ou lorsqu’elle a refusé de se soumettre aux vérifications, ou lorsque le conducteur n’est pas titulaire du permis de conduire. Les peines sont portées à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende en cas de cumul d’au moins 2 des circonstances précitées.
- La loi crée un délit d’organisation, d’incitation et de promotion des rodéos passible de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.
Des peines complémentaires sont également prévues :
- Confiscation obligatoire des véhicules.
- Suspension ou annulation du permis de conduire.
- Peine de travail d’intérêt général ou peine de jours-amende.
- Obligation pour la personne d’accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière.
Des sanctions difficiles à appliquer
Bien que les sanctions encourues soient dissuasives, il est en réalité peu évident de les faire appliquer.
D’abord parce que les policiers ne sont pas toujours en mesure d’intercepter les délinquants, sans déclencher une course poursuite dangereuse.
Aussi, les amateurs de rodéos sauvages roulent généralement sans plaque d’immatriculation. Cet arsenal législatif est donc vain si les interpellations n’ont pas lieu.